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vendredi 16 mars 2012

EN HOMMAGE AUX PETITS, AUX SANS GRADE...

J'ai demandé à son fidèle ami, le général ESQUIVIE, d'évoquer la grande figure de Pierre SCHOENDOERFFER ... de m'écrire une rubrique nécrologique de cet homme d'exception qu'il a bien connu et fréquenté.
Notre complice commun a immédiatement accepté et je l'en remercie...

" Le poète est parti... et nous sommes tristes. Magnifique commentaire de son fils, Frédéric, qui nous dit que son départ le fâche. Car cet homme n'était pas comme les autres.
Lors de son entrée à l'Institut...(A.W.)



Toute sa vie il est resté un grand enfant, avec une formidable capacité d’enthousiasme qui alimentait son génie pour saisir l’intime sublime du rapport humain et le faire comprendre par son art, le cinéma. Avant d’être un homme, un mari, un père, un ami, il était une pensée, un mythe, un poème, une lumière. Il est difficile d’associer le départ physique de l’homme et  l’interruption de son œuvre aussi immortelle qu’universelle … on est tous fâchés.
Pierre Schoendoerffer, n’était pas un militaire mais ses pas de journaliste l’ont conduit en ce vingtième siècle de violence sur les théâtres où se mesurait cette violence. Il a alors côtoyé la guerre et surtout ses exécutants de base en découvrant qu’ils étaient les véritables héros méconnus de ces affrontements décidés par d’autres. Il a ainsi redécouvert, les grandeurs et servitudes militaires, et leur a donné des heures de gloire grâce à son génie cinématographique et à sa maîtrise du septième art. Il a découvert le simple et authentique héroïsme dans le comportement de soldats  d’une section de l’Armée française en Indochine. Cela s’est traduit par cet extraordinaire film «  La 317 ème section » qui est une évocation culte non seulement pour nous français mais aussi pour l’étranger. Il faut se souvenir d’un autre film qui retrace le parcours d’un officier de marine atypique dont il a voulu montrer l’héroïsme ordinaire et quotidien, sous le titre « Le Crabe Tambour ».
Les américains ont aussi fait appel à ce conteur unique avec la réalisation d’un film sur l’armée américaine au Vietnam ; ce fut « La section Anderson ». Et puis il y eut ce film terrible et magique qu’il voulut et sut faire sur Dien Bien Phu, car cet homme a vécu dans la cuvette ce combat qui vit la défaite de nos troupes et le départ en  captivité. Le film est totalement atypique encore une fois car il rend hommage aux petits, les sans grade , les soldats de base qui ont tant souffert dans le silence et l’abnégation . Ill les inscrit ainsi dans l’Histoire trop souvent réservée aux Grands chefs de guerre et aux stratèges. Dans ce film il y a un moment sublime, qui se passe sur le tarmac de l’aéroport de Saigon. Dien bien Phu vit ces derniers jours et tout le monde le sait. Néanmoins des parachutistes en file indienne attendent de  pénétrer dans l’avion qui va les larguer sur la cuvette d’enfer. Un journaliste interroge un de ces parachutistes au hasard :
«  Pourquoi aller la-bas ? (sous-entendu ; c’est fichu ) »
Réponse du soldat : «  Parce qu’il y a des copains là-bas ! »
C’est sublime, c’est héroïque, c’est humble, c’est Français. Gloire à ces héros dont les  restes sont à jamais perdus dans la terre de Dien Bien Phu.
J’ai eu cet immense privilège, honneur, fierté de faire la connaissance de Pierre Schoendoerffer il y a une trentaine d’années. J’ai passé des heures inoubliables avec lui et sa famille dans leur propriété de Bretagne. Je pense à son épouse sans laquelle il n’aurait jamais pu faire ce qu’il a fait. Elle était elle-même grand reporter quand elle a fait sa connaissance. Elle a abandonné son métier pour s’occuper uniquement de son mari et de sa famille. Elle veillait sur tout afin qu’il puisse se consacrer uniquement à son œuvre, à ses créations. Depuis nous nous sommes retrouvés à maintes occasions, toujours dans une ambiance très familiale. Son appétit de savoir, de comprendre, sa générosité étaient  inchangés, hors des contraintes matérielles. Il était un être pur et spontané comme jamais il m’a été donné d’en rencontrer. Il va rester comme un exemple pour les générations à venir comme il l’est pour ses enfants et pour les nôtres.
Général ( 2S ) Esquivié Jean-Louis

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