Ma rencontre avec Horst DRECHSEL
J’ai fait la
connaissance d’Horst Drechsel dans les années 1970.
Un éditeur
anglais, Winston RAMSEY, spécialisé dans les ouvrages consacrés à la seconde
guerre mondiale, avait transmis à Alain Roudeix et à moi-même, via Eddy
Florentin, une série de photographies de « La Poche de Falaise »
prises sur le vif par des reporters de l’armée britannique et collationnées
depuis au British War Muséeum.
C’était le but de
sa mission !
Ils mettaient en
scène quelques scènes cruciales de cette bataille et notre rôle était de
retrouver les endroits où ces clichés avaient été pris.
Nous nous mîres à
la recherche de ces décors en compagnie d’Alain Roudeix, surnommé « Le
spécialiste des spécialistes », par l’éditeur d’ « After
the Battle » tout au long de la
ligne de front à l’intérieur du fourgon Volkswagen qui lui servait à la fois de
bureau et de cabinet de travail.
Beaucoup
d’endroits furent identifiés comme le « Gué de Moissy » mais
nous restions nous ne réussissions pas à découvrir deux ou trois séquences comme cette colonne de
prisonniers allemands, près d’un carrefour, au sortir du « chaudron ».
Nous ne savions
quoi répondre quand je fus contacté, en 1974, par un ouvrier retraité qui me
disait s’être reconnu parmi ces détenus.
Rendez-vous fut
pris rapidement avec cet homme qui nous rejoignit avec son épouse, une Normande
des boucles de la Seine.
Ils arrivèrent
dans une petite voiture, de marque « Renault », derrière laquelle
était collé un « F » !
Avant d’aller sur
le terrain, il me raconta « sa guerre » et rapidement mis en
confiance, il me narra même quelques anecdotes personnelles.
Jeune Allemand, né
à l’Est du territoire, il avait d’abord été incorporé dans les « Jeunesses
Hitlériennes » puis, quand il en eut l’âge, il fut admis dans la
Wehrmacht.
A ce titre, il participa triomphalement à la
Campagne de France puis, moins plaisant, quand le pacte germano-soviétique fut
rompu, il se retrouva à se battre, tout en se gelant, sur le front russe.
Ayant la ferme
volonté de repartir à l’ouest par n’importe quel moyen, il fut informé un jour
que Meindl formait une unité d’élite de parachutistes pour sauter et
conquérir l’Angleterre.
Alors, il
s’engagea en implorant le sort que jamais il n’ait l’occasion d’être largué sur
les îles britanniques, sachant quel sort lui était réservé.
Il gagna la région
de Saint-Brieuc où commença le formation. Celle-ci était dure mais préférable
au traitement des soldats sur le front russe. Il était équipé d’un nouvel
uniforme et d’un casque aux formes arrondies, remanié pour la circonstance.
Pendant qu’il
s’entrainait, il apprit le débarquement du 6 juin et gagna très promptement la
zone des combats.
Il se battit sans
conviction sur les plages, puis à Caen. Il se retrouva dans la Poche de
Falaise comme soldat affecté dans une unité de transmissions porteur d’un
téléphone ultra secret.
A Aubry-En-Exmes
il retrouva le puits où il l’avait jeté le 18 août pour ne pas que les ennemis
le découvre, puis il évoqua la bataille de Chambois.
Il me précisa que
les officiers qui, dans leur grande majorité, ne croyaient plus à la victoire
de l’Allemagne, avaient quitté les lieux et notamment durant la nuit du 19 août
.
Seuls les
combattants « SS » étaient encore convaincus. Alors ce fut la
panique et l’exode.
Quand la Poche fut
fermée, il fut fait prisonnier par les Américains et conduit en colonne jusqu’à
un camp provisoire à Nonant-Le-Pin.
Les jours
suivants, il fut conduit au Havre puis
aux U.S.A. où il demeura enfermé dans un cantonnement jusqu’en 1954 !
Quand il fut enfin
libéré et que le bateau le ramena en France, c’était pour apprendre que le
village où il avait toujours vécu était envahi par les Russes et intégré à l’Allemagne de l’Est.
Contrit, il décida
de rester en France et revint en Normandie. Il alla jusqu’à Elbeuf et
proposa son recrutement aux usines Renault.
Dans cette usine,
il fit la connaissance d’une jeune Française et s’installa avec elle à Elbeuf.
Quelques années plus tard, il l’épousa, demanda et obtint la nationalité
française.
A l’heure de la
retraite, il resta dans cette ville normande et une coupure de journal qui
rappela soudain son parcours.
Je me souviens qu’il
me déclara sans haine et avec calme : « Je suis resté embrigadé,
soldat puis prisonnier pendant plus de vingt ans… Tout ça pour finir dans les
bras d’une Française… avec la nationalité française ! Le destin réserve
parfois des surprises ! »…
Il décédera trois
ans plus tard à Bois-Guillaume.
Photo : Drehsel et ses compatriotes regroupés dans un camp provisoire à NONANT-LE-PIN par les Américains ! (Cliché armée anglaise)
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